Les clairs de lune de Pierre-Yves Hodique à La Scala Paris

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Arriver un peu tôt à La Scala Paris n’est pas un problème. Ce théâtre à la programmation qui mêle théâtre et musique dans ses deux salles met un vrai bar et un vrai restaurant à la disposition du public qui y accède librement. Le lieu est intime, chaleureux malgré ses murs bleu nuit, typiques de Richard Peduzzi qui a été l’architecte de la rénovation-reconstruction de cette vieille maison. On y a attendu le récital de Pierre-Yves Hodique, l’un des secrets les mieux gardés du piano en France, plutôt que « français », cet adjectif ravivant le souvenir d’une « école » tout en doigts qui eut ses porte-drapeaux Marguerite Long et Isidor Philipp – défaits par Lazare-Lévy, Yves Nat et Alfred Cortot qui imposèrent un jeu autrement plus poétique. 

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Pierre-Yves Hodique à La Scala Paris

© DR

Pierre-Yves Hodique parle-t-il de cela avec les étudiants du Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris où il seconde Marie-Josèphe Jude qui y a une classe de piano ? Le voici qui entre dans la petite salle (La Piccola Scala) dont les sièges en gradin entourent le piano. On aperçoit quelques-uns de ses confères venus « prendre leur leçon » par amitié et par admiration, les pianistes Vincent Mussat, Guillaume Sigier sont notamment là. Le compositeur Pierre Charvet de la direction de la musique à Radio France est là aussi, comme le tout jeune compositeur Valentin Smoliak juste arrivé d’Ukraine et bien sûr Fabien Touchard dont une œuvre sera donnée ce soir.

Hodique salue et se lance dans Clair de lune de Debussy qui ouvre un récital dont le programme est le même que celui de son premier CD comme soliste, dont il fête ainsi la sortie (Scala Music). À la première tierce, on est attrapé par une sonorité charnue et lumineuse, d’une profondeur incroyable : mais comment sort-il des sons si longs d’un quart de queue ? Plus encore, on est captivé par une éloquence née de l’attention du musicien à l’harmonie, au subtil équilibre des registres et à la précision d’articulation des plans sonores. C’est du magnifique piano et dans le même temps ce n’est pas du piano, car si Hodique en joue à la perfection, il s’en sert pour fabriquer de la musique pour le public qui l’écoute avec une concentration palpable. Et cette pièce qui peut sembler facile ouvre ainsi un monde sonore dans lequel le musicien va nous entraîner à travers des œuvres d’Abel Decaux dont La Mer évoque parfois Scriabine mais surtout impose un climat prenant et mystérieux, de Joseph Jongen dont le Clair de lune fait songer au Gibet de Ravel composé la même année – mais la nuit du compositeur belge est moins moins effrayante que celle du Français.

Hodique nous conduit là où la musique doit nous conduire, ce n’est pas qu’il s’efface, non il est là et bien là, magistral, mais son esprit puissant modifie notre rapport à l’interprétation : on ne pense qu’à la musique, rien qu’à elle, à la façon dont elle progresse dans le temps et l’espace. Vient la Sonate « Clair de lune » de Beethoven. Ce diable de musicien, l’air de rien, va la jouer d’une façon radicale en prenant un tempo soutenu dans le premier mouvement qui échappe ainsi à la rêvasserie nocturne comme à la pose mélodramatique, en jouant le deuxième mouvement comme un scherzo vif, enlevé et néanmoins dansant, et le finale en un éclair. Les doigts y sont véloces, les accords furieux, l’allure tragique, mais la clarté des idées dégage les lignes de tout effet pianistique. Renversant ! On attendrait plutôt pareille lecture d’un Andreas Staier sur son pianoforte…

La Terrasse des audiences du clair de lune de Debussy pour suivre : on aimerait entendre tous les préludes et les études du compositeur sous les doigts de ce chat qui glisse sur le clavier en laissant une empreinte sonore et poétique indélébile qui explose dans le tragique Carillon nocturne de Georges Enesco. Les agrégats harmoniques, les sonneries de cloches et la rythmique complexe de cette ultime pièce de la Suite op. 18 évoquent Messiaen et Bartók tout en étant du pur Enesco, l’un des compositeurs décidément les plus sous-évalués du XXe siècle. 

Pour finir, Le Noir de l’ange de Fabien Touchard, un concerto pour piano et électronique composé pour Pierre-Yves Hodique. Sans renoncer aux formules consacrées du concerto romantique – octaves déferlant sur le clavier, héroïsme, cadence solo –, ce jeune compositeur exploite formidablement bien l’électronique en lui faisant envelopper et porter le piano vers des sommets de tension et d’extase mélodico-harmonique qui parfois font penser à Rautavaara. Cette musique sonne et est admirablement servie par Hodique qu’on espère réentendre rapidement.

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