Léo Walk : « Dans la danse, on sait qu’on galérera toute sa vie

, Léo Walk : « Dans la danse, on sait qu’on galérera toute sa vie

Paris Match. “Maison d’en face” est en tournée. Votre façon de travailler a-t-elle changé après l’expérience du premier spectacle ?
Léo Walk.
Avec le premier, je me suis découvert. Là, j’ai une patte, ma patte, qui se forge sans que je ne m’en rende vraiment compte. J’ai pris certains automatismes. J’ai de plus en plus tendance à trouver les mouvements complexes moins beaux, moins touchants, et à penser que les images simples sont beaucoup plus fortes.

Que voulez-vous raconter ?
L’idée du spectacle est partie d’un ras-­le-bol de tout ce qu’il se passait dans le monde et d’un vrai manque de nuances. J’ai reçu des messages agressifs d’artistes au moment du mouvement Black Lives ­Matter lorsqu’il a émergé en France, parce que je n’avais pas posté de carré noir de soutien sur mon compte Instagram. C’est hallucinant. La plupart des artistes n’osent plus parler par crainte d’être lapidés en place publique. Je suis un des seuls à pouvoir le faire à travers la danse, alors j’en profite.

Vous multipliez les projets dernièrement, dans la mode, dans la musique. Vous n’avez pas peur de vous perdre ?
Quand tu commences à être connu, tu es partout. Mais ce sont les partis pris qui définissent ce que tu es. Certains se lancent dans des partenariats bancals, ils acceptent tous les buzz et avec le recul, leur parcours n’a aucun sens. Il faut se donner une ligne directrice, et je crois que je suis en train de trouver la mienne.

 Je me voyais animateur en banlieue et danser, mais par passion 

Léo Walk

La danse, ça a été une évidence ?
Totalement. J’ai toujours dansé, la question ne s’est jamais vraiment posée. J’étais un gamin extraverti, le chef de bande, je bougeais tout le temps. Adolescent, c’était différent. À 15 ans, j’étais déscolarisé, sans diplôme, je buvais des flashs sur les parkings, j’étais perdu. La tournée de Christine and the Queens a changé ma vie. J’avais 20 ans et j’ai enfin compris ce que je voulais faire.

Avant ça, vous ne l’envisagiez pas comme un métier ?
Je me voyais animateur en banlieue et danser, mais par passion. Je ne pensais pas que c’était possible d’en vivre. Dans les années 2000, il fallait choisir entre le circuit ­opéra-danse classique-contemporain ou danser pour des clips de musique, il n’y avait aucune autre option. À Paris, il se tournait un clip tous les six mois, on était huit cents à auditionner. Le circuit était fermé. Surtout dans mon quartier, le champ des possibles était limité. Ce sont des chanteurs comme Christine ou Stromae qui ont mis la danse en valeur et ont ouvert des portes.

La suite après cette publicité

 On a des statuts très précaires. Et, ça me va de ne pas être millionnaire 

Léo Walk

Aujourd’hui, il y a plus d’occasions pour les danseurs ?
Je n’en connais pas qui ne travaillent pas. Quel que soit ton genre de danse, même expérimentale, il y a tellement de demandes ! Dans la pub, dans la mode, on ne fait plus rien sans chorégraphe : les mannequins ne savent pas toujours poser, donc des chorégraphes les guident. Moi, il m’arrive d’être payé pour dire “tends la jambe” pendant une séance photo. C’est très étrange. Mais ça nous fait vivre, donc tout le monde est content. On a besoin de ça, avec les spectacles, je ne gagne rien du tout…

Ce n’est pas rentable ?
Ah non. Si j’étais chanteur, ce serait une autre histoire. Dans ce métier, on sait qu’on galérera toute sa vie. On est des intermittents, on a des statuts très précaires. Et, ça me va de ne pas être millionnaire. Les gens autour de moi qui ont gagné des millions trop vite, trop tôt, se sont tous perdus.

 Je viens d’un milieu populaire, ça crée des tensions, les gens ne comprennent pas que tu ne partages pas tout 

Léo Walk

Vous n’avez pas la richesse mais vous connaissez la notoriété. Elle vous a éloigné de certaines personnes ?
C’est très banal mais oui, évidemment. Je viens d’un milieu populaire, ça crée des tensions, les gens ne comprennent pas que tu ne partages pas tout. Une fois, un média ­filmait un documentaire là où j’ai grandi et, en plein tournage, un de mes potes d’enfance est venu voir le caméraman pour lui parler de sa marque de sex toys ! On a beaucoup ri, mais ça n’avait rien à faire là. Heureusement, ils n’ont gardé que les meilleurs moments !

Comment avez-vous atterri sur la tournée de Christine and the Queens ?
Je me souviens que quand j’ai passé l’audition, son nom n’était même pas écrit sur les fiches. Ils avaient mis “chanteuse de pop”. Et j’ai été bluffé par la fille. Elle avait une innocence folle à l’époque. C’est un génie, une tronche, une rock star. Elle sait danser, bouger, créer. Je l’ai vue des centaines de fois sur scène et, chaque soir, je prenais une claque. Ce sont des ­souvenirs dingues.

 Après Christine and the Queens, je n’ai rien fait pendant quatre mois. Je n’ai pas reçu un seul appel 

Léo Walk

À quel moment avez-vous senti que le ­phénomène prenait de l’ampleur ?
Après le clip “Christine”, la capacité des salles a commencé à augmenter. Au début, on dansait sur des scènes toutes petites, on avait à peine la place de bouger, et puis on est parti aux États-Unis, jamais je n’aurais imaginé un truc pareil. J’ai revu des photos de l’époque il n’y a pas longtemps, ça m’a rendu triste. On me raconte beaucoup de choses sur elle… Je ne sais pas trop si c’est vrai, je n’ai plus de contacts avec elle. Elle a arrêté de me parler sans explication.

Ça a été un accélérateur, cette tournée avec elle ?
Pas du tout ! Je n’ai rien fait pendant quatre mois. Je n’ai pas reçu un seul appel. Je suis reparti au charbon, j’ai refait des ­battles, des petits projets pour gagner de l’argent. Les gens se moquaient totalement que j’aie dansé sur la tournée de ­Christine. Mais c’est à cette période que j’ai été le plus inspiré. J’ai été obligé de me dépasser et ça m’a permis de faire tellement de choses…

«Maison d’en face», en tournée avec sa compagnie La Marche bleue

«Maison d’en face», en tournée avec sa compagnie La Marche bleue © DR

À lire aussi : «À l’écoute du bleu», de Léo Walk, éd. Gründ, 216pages, 29,95 euros.

La chronique se veut reproduite du mieux possible. Afin d’émettre des observations sur ce document concernant le sujet « Ecole de Danse du Marais », veuillez contacter les coordonnées indiquées sur notre site internet. paris-dance.com est un agrégateur d’information qui garde différentes actualités publiées sur internet dont le thème central est « Ecole de Danse du Marais ». Pour vous faciliter la tâche, paris-dance.com vous partage cet article qui traite du sujet « Ecole de Danse du Marais ». Connectez-vous sur notre site internet paris-dance.com et nos réseaux sociaux dans l’optique d’être renseigné des futures publications.

Léo Walk : « Dans la danse, on sait qu’on galérera toute sa vie
Retour en haut