Le style Jérôme Robbins va comme un gant aux danseurs de l’Opéra de Paris. Pour s’en convaincre, il suffit de les voir à l’œuvre dans le trio de ballets proposés du 24 octobre au 10 novembre 2023 au palais Garnier. Qu’ils naviguent dans les eaux jazzy et ensoleillées d’En sol, explorent la vie d’un couple d’amoureux dans In the Night ou dézinguent avec esprit tous les gimmicks de la danse classique dans The Concert, on se régale à redécouvrir les œuvres du génial chorégraphe de West Side Story et maître du néo-classicisme à l’américaine.
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Les vacances à la plage selon Robbins
Simplicité, musicalité, perfectionnisme. C’est par ces mots que l’on décrit souvent Jérôme Robbins dont l’esprit et le style est ancré de manière indélébile aux États-Unis, aux côtés de George Balanchine. Son œuvre a également infusé à l’Opéra de Paris, qui compte à son répertoire 19 de ses ballets. Parmi eux, En sol concentre la vivacité et l’intelligence de son langage artistique, à travers une danse légère et décontractée.
Sur le concerto pour piano et orchestre en sol majeur de Maurice Ravel, un petit groupe s’ébat sur une plage imaginaire. Seuls éléments de décor : une toile de fond bleu océan et des costumes signés Erté, dessinateur phare de la revue de mode Harper’s Bazaar. Dans des combinaisons de bain ornées de vaguelettes colorées, la douzaine de danseurs, athlètes en goguette, bondissent insouciamment, au rythme d’un piano aux éclats solaires et jazzy.
Au milieu de cette joyeuse troupe, surgit une femme, toute de blanc vêtue, incarnée par la danseuse étoile Léonore Baulac. Longs développés, diagonales tournoyantes de déboulés, elle est vite rejointe par son alter ego masculin, l’étoile Germain Louvet.
Le soir venu, ils se livrent à un pas de deux, tout en souplesse aquatique et brasses romantiques, porté par l’adagio méditatif de Ravel. Elle se laisse attraper au vol d’une pirouette attitude, il la glisse hors de l’eau dans des portés pleins de douceur. L’alchimie du couple, habitué à danser ensemble, fonctionne bien. Dans le tableau final, le corps de ballet, loin de faire de la figuration, s’en donne à cœur joie autour du duo amoureux, épicentre frémissant d’un ballet tissé dans l’insouciance de l’été.
In the night, les émois amoureux vus par la danse
Dans le prolongement d’En sol, In the night, créé près de 15 ans plus tard en 1989, propose une ambiance beaucoup plus intimiste. Mais on retrouve les mêmes portés aériens, allongés jusqu’au bout des pointes, une fluide simplicité et une musicalité innée. Cette fois-ci, l’histoire très simple de trois couples à différents temps de la vie est racontée sur des Nocturnes de Frédéric Chopin, compositeur que Jérôme Robbins a régulièrement exploré – « je crois que [sa musique] m’a hanté toute ma vie » disait-il.
Trois duos d’étoile incarnent tour à tour ces différents âges de l’amour : la tendresse juvénile (Myriam Ould-Braham et Paul Marque), la complicité d’un couple (Valentine Colasante et Marc Moreau), les orages d’une liaison mature (Dorothée Gilbert et Hugo Marchand). C’est de la belle danse, sans esbroufe, un peu nostalgique et infiniment poétique.
Se démarque en particulier le troisième pas de deux, celui qui recueille en général la préférence du public. Il faut dire que tous les ingrédients sont réunis : des portés de haute voltige, une musique à l’énergie sombre des jours de dispute, et surtout, deux artistes dont le partenariat sur la scène est au sommet. Pas besoin de mots pour comprendre l’histoire. Tout est dit dans l’accélération brusque d’une pirouette, l’élan fougueux d’un porté, les regards noirs, qui se cherchent quand même.
Quand le ballet vire à la parodie
Pointilleux et musical, Jérôme Robbins savait aussi faire rire. Et c’est ce qu’on constate à nouveau en 2023, à la redécouverte de son inclassable ballet The Concert, sous-titré « Ou les malheurs des gens », qui se moque comme personne des petits travers et ficelles kitschs du ballet, tout en croquant avec espièglerie des personnages stéréotypés dans une série de sketchs dansés, toujours sur des célèbres œuvres de Frédéric Chopin. Pour l’occasion, le piano est aussi sur scène.
Même la pianiste, derrière sa robe en velours noir des grands soirs, fait partie de la farce et joue les petites névroses et grands egos d’une concertiste. Une fois les poussières du clavier sentencieusement nettoyées et la prière aux muses, saints et dieux des arts accomplie, le concert peut commencer.
Arrivés au compte-goutte, les spectateurs se placent avec plus ou moins de discrétion et d’intérêt. Il y a le grand timide qui n’ose s’assoir nulle part, le couple bourgeois qui se dispute en catimini, les deux midinettes qui farfouillent dans leur sac à grand bruit, et la ballerine si éprise de musique qu’elle se colle au piano.
Les tableaux suivants montrent la rêverie des spectateurs, inspirés des titres officieux des partitions musicales, tels « valse minute », « prélude de la goutte d’eau », ou « ballade du papillon ». Dans le rôle de la grande romantique surjouant un cygne un peu trop lyrique, Hannah O’Neill est très à l’aise.
Une autre scène, durant laquelle six danseuses tentent de réaliser en harmonie une chorégraphie, est un petit bijou d’humour pour qui aime les ensembles au cordeau de la danse académique. Le chorégraphe n’a pas son pareil pour se moquer avec tendresse des figures emberlificotées dont le ballet raffole parfois. Il s’amuse, aussi, à parodier les mimétismes d’une société sous influence, comme lorsque les parapluies des danseurs s’ouvrent plus en fonction du regard des autres que de la météo.
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