Face à moi dans sa loge à Garnier, Xie Xin semble flotter dans le long imper qu’elle porte. Mais dès qu’elle se met à évoquer la danse, elle se métamorphose. Geste ample, parole précise. Elle partage en ce début de saison l’affiche avec Marion Motin. Pour les deux femmes, c’est une première à l’Opéra de Paris.
« Aurélie Dupont avait vu mon travail avec les BalletBoyz à Londres, en 2019, puis a lancé son invitation », raconte la chorégraphe chinoise. Le Covid arrivant, les rencontres se sont faites en vidéo. « Mais la commande n’a pas été annulée et je suis ici, à Paris. » Sa distribution, elle avoue ne pas l’avoir choisie. « On sent chez les danseurs parisiens une vraie sensibilité. Les plus jeunes, de par leur formation classique, doivent encore s’ouvrir… La technique est la fondation, mais qu’y a-t-il au-delà ? »
« Un corps occidental avec un esprit tourné vers l’Asie »
L’ancienne interprète de Sidi Larbi Cherkaoui a créé sa compagnie à Shanghai il y a dix ans. « Pour ce qui est de la création contemporaine en Chine, je suis en pleine confusion, avec l’impression d’aller de l’avant bien que l’esthétique du public penche pour une certaine beauté classique. Il faut former son esprit. C’est un long pari. » Xie Xin a inventé sa propre technique de danse, mélange d’influences. « Un corps occidental avec un esprit tourné vers l’Asie », résume-t-elle, non sans une certaine assurance. Sa pièce s’intitule « Horizon ». Celui de Xie Xin paraît dégagé.
Marion Motin et Xie Xin au Palais Garnier, à Paris. Paris Match / © Julien Benhamou
« Je m’attache aux personnalités », aime à dire la Française Marion Motin. La sienne est du genre extraverti, aussi à l’aise auprès de Madonna ou Stromae que dans les battles hip-hop. Au point qu’on ne sait pas dans quelle catégorie la ranger. « Cette diversité, c’est moi. Aurélie Dupont, en me conviant à l’Opéra de Paris, m’a dit : “Reste fidèle à qui tu es.” »
Pour « The Last Call », Marion Motin peut compter sur des jeunes talents en vue de la compagnie : Axel Ibot, Caroline Osmont, Ida Viikinkoski ou Enzo Saugar. Pas d’étoiles. « Qu’ils soient bons techniquement ou pas, j’ai besoin qu’ils soient justes. » Marion Motin s’en est déjà fait des alliés pour cette création qui lui tient à cœur. Car ce « dernier appel », c’est celui que lui a passé son père avant de partir. « Tu es alors dans la douleur de la perte. Mais tu te dois de rester dans la vie. Ce spectacle est pour lui. »
Marion Motin et Xie Xin au Palais Garnier, à Paris. © Julien Benhamou
La chorégraphe y insufflera quand même de la joie, du fantastique. La bande-son est signée du compositeur Micka Luna, rencontré à Londres pour la création de « Rouge » avec le ballet Rambert. Marion se sait attendue au tournant, d’une certaine façon. « Dès que je rentre en studio de répétition, le stress me quitte. »
Philosophe, elle répète que l’important, ce n’est pas tant l’objectif que le chemin parcouru. Après « The Last Call », Marion Motin devrait retrouver en tournée la folle troupe du « Fashion Freak Show » de Jean Paul Gaultier, dont elle règle les chorégraphies depuis sa création. Le Portugal, l’Italie, l’Australie l’attendent. « Mon rêve un peu fou est de monter une comédie musicale. J’ai des idées plein la tête ! » Faites passer le message.
Programme Xie Xin / Marion Motin / Crystal Pite, du 23 septembre au 12 octobre au Palais Garnier, Paris. operadeparis.fr.
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