« Mesdames et messieurs. nous avons un problème technique pour notre premier concert parisien. Nous essayons de le résoudre. Priez pour nous. » Voilà déjà quarante-cinq minutes que les 20 000 spectateurs de l’Accor Arena attendent fébrilement leur reine de la pop. Il leur en faudra quinze de plus, ce dimanche soir 12 novembre, avant que ne débute la première des quatre représentations parisiennes du « Celebration Tour ».
Pour ouvrir ce bal, balayant quatre décennies de musiques pop emblématiques, Bob the Drag Queen a enfilé son pouf rose et une robe à panier de satin, façon Marie-Antoinette, clin d’œil à la performance de sa madone lors de la cérémonie des VMA en 1990. Ce caméléon transformiste, championne de l’émission américaine « RuPaul’s Drag Race » en 2016, a été choisi pour tisser, tout en esprit, le fil d’Ariane de cette rétrospective mélodique :
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« Es-tu gay ? », interroge-t-elle à la volée un spectateur parisien en traversant la fosse de l’arène.
– Non.
– Mauvaise réponse. Si vous êtes un fan de Madonna, vous l’êtes forcément. »
Après avoir chauffé l’auditoire quelques minutes, la Madame Loyale laisse place à la madone. Dans une longue robe noire, Madonna, affublée d’une auréole, prêche « Nothing Really Matters » pour commencer cette pièce musicale canonique en six actes, qui oscillera entre allégresse et ennui, fausses notes et justesse.
Discours sincère, chant dissonant
Retraçant ses 40 années de carrière, la diva replonge dans la genèse de son mythe. Dans le New York de 1982, où elle faisait du hard rock en se prenant pour Sid Vicious avec Stephen Bray, batteur de son groupe Breakfast Club. Veste queue-de-pie punk imaginée par la créatrice Dilara Fındıkoğlu, corset au sein pointu grunge et mitaine de dentelles sont de rigueur pour interpréter « Everybody », tout premier single qui propulsa la jeune femme de 24 ans dans la lumière. Et de catéchiser, déjà, la sainte parole :
« Je suis désolée, il y avait du retard. Mais pour une fois, ce n’est pas de ma faute. Je suis la personne la plus reconnaissante au monde. Vous savez, rien ne change après toutes ces années. Désormais, je vais vous raconter l’histoire de ma vie. »
A 65 ans, Madonna n’élude rien de son ébauche « affamée, fauchée et effrayée », quand elle tentait de survivre loin de ses parents, avec 35 dollars en poche. Son discours semble sincère et maîtrisé. De légers trémolos viennent augmenter sa tessiture. Et fragilisent un peu plus sa performance.
« Je n’ai pas apprécié le fait de ne pas avoir d’argent, de travail rémunéré. J’avais toujours faim, j’avais toujours peur. Ce n’était pas chic. Même si maintenant la vie est belle. Je n’ai pas le droit de me plaindre, même si ma vie est dichotomique. Je ne dois pas me soucier de ce que pensent les gens de moi. Et, en même temps, je dois me soucier profondément de ce que pense mon public de mes prestations », glisse-t-elle, bouteille de bière à la main.
Après « Burning Up », chanté dans une justesse molle sur le manche électrique de sa Gibson Les Paul, elle descend une dernière lampée pour la recracher sur une fan devant elle. Et de filer sous une énorme boule disco à la Danceteria, célèbre discothèque new-yorkaise où elle a convaincu le DJ Mark Kamins de jouer son premier 45 tours. S’enlacent les tubes « Open Your Heart » et « Holiday » avec sa horde de danseurs. Quelques-uns sont issus du collectif contemporain (LA) HORDE, aux commandes du Ballet national de Marseille et chargé de la direction artistique du show. Quand l’un des partenaires de danse tombe, elle le drape dans son manteau. La fête est finie. Sans avoir jamais vraiment commencé.
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La forme avant le fond
Madonna décide de prendre de la hauteur, sur une nacelle mobile, à plusieurs mètres au-dessus de ses fidèles. « Live to Tell » résonne. D’imposants panneaux se déplient et affichent des visages noir et blanc. Martin Burgoyne, son colocataire à New York ; son ex-professeur de danse Christopher Flynn ; et kyrielles d’artistes émérites : le peintre Keith Haring, le performeur de cabaret John Sex, le cinéaste Howard Brookner, la créatrice de bijoux Tina Chow ou le photographe Herb Ritts.
Tous étaient ses amis intimes. Tous sont décédés des suites du sida. Madonna devenue icône sacrée du mouvement LGBTQIA + est restée auprès d’eux jusqu’à leur dernier souffle. Allant parfois jusqu’à régler les frais médicaux faramineux engendrés par cette terrible épidémie. Pour clôturer ce tableau hommage, alors qu’un clown triste tourne seul autour de la scène avec un ballon de baudruche rouge flottant dans les airs, des centaines de portraits d’anonymes se démultiplient derrière elle. Sur huit écrans géants, toutes ces âmes ont elles aussi été emportées par le virus du sida. Et sont issues du The AIDS Memorial, un mémorial en ligne sur Instagram. Pour ne jamais les oublier. Rappelant au passage pourquoi elle a choisi le Malawi pour adopter sa seconde fille Mercy James.
« J’ai découvert que c’était un pays où un million d’enfants sont devenus orphelins à cause du sida. Pourquoi personne ne les aide ? Parce que le Malawi n’était pas un pays où nous pouvons violer et coloniser. Il n’y a pas de ressources naturelles, donc personne n’en a rien à foutre, comme ils le font actuellement en République démocratique du Congo. »
Militante investie, Madonna continue de dérouler la frise chronologique de sa vie. Dénué de musiciens, ce spectacle est un moyen de revendiquer sa propre histoire. Mais aussi prouver son influence sur la musique et sur le monde au cours des 40 dernières années. Elle, éternelle provocatrice, multiplie les blasphèmes. Pour célébrer ses nineties, elle lance une messe noire avec des chants grégoriens clamant son invocation liturgique. Elle lâche dans la langue de Shakespeare un distinct « va te faire foutre » quand des forces de l’ordre l’arrêtent au rythme d’« Human Nature ». Sur « Like a Prayer » , elle fait chorégraphier des âmes en culotte noire dans un carrousel sépulcral. Comme pour rappeler une crucifixion moderne du Christ. Avant de déclamer sa libération sexuelle sur « Erotica », enroulée dans un peignoir de boxe avec sa pléiade de danseurs armés de gants pailletés. Pour finalement dévoiler une nuisette satinée rouge et noir et simuler un acte sexuel sur un lit de velours avec son double censuré par MTV dans le clip « Justify My Love » de Jean-Baptiste Mondino, en 1990.
Le mieux, ennemi du bien
La forme chorégraphiée et costumée de ce concert est toujours calculée au millimètre. Parfois, au détriment de la précision scénique de son chant. Il faudra finalement attendre son « Hung Up », onzième des 27 titres de sa liste, pour que l’antre de Bercy se réveille. Sa performance prend, enfin, un peu d’allure. Sur « Vogue », Madonna a soufflé à Jean Paul Gaultier de lui recréer son emblématique soutien-gorge conique arboré sur la tournée « Blonde Ambition ». Cette fois, avec sa minirobe noire incrustée de cristaux, elle fait défiler les danseurs lookés sur le podium. Sa fille adoptive Estere, 11 ans, d’abord DJ sur ce titre attire toutes les attentions finales et clôt cette saynète dans un voguing furieux devant sa mère-juge.
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Vient ensuite un nouveau millénaire d’idées, synonyme de résurrection pour la Sainte Vierge de la pop grâce aux albums « Music » (2000) et « American Life » (2003). Madonna, avec une cavalcade de tubes (« Die Another Day », « Don’t Tell Me »), tente de chevaucher en cowgirl son public. Mais l’interprétation est tiède. Même « La Isla Bonita » et « Don’t Cry for Me Argentina » ne suffiront pas à déchaîner les foules, tant ses deux prestations essoufflées et hors tonalités chagrinent.
La fatigue pour les 14 shows de cette tournée pourtant naissante en serait-elle la cause ? Peut-être. D’autant que Madonna, qui a effectué un séjour aux soins intensifs en raison d’une grave infection bactérienne il y a quatre mois, entend monter sur scène pour 78 dates jusqu’en avril prochain. Ou serait-ce la faute d’un trop-plein de références scéniques et autres samples musicaux omniprésents ? Assurément. Entre les extraits de « Unholy » de Sam Smith, « Fever » de Little Willie John ou « Let’s Go Crazy » de Prince, la reine de la pop rend même un hommage à son roi Michael Jackson, dans un mash-up enregistré et douteux de « Billie Jean » et « Like a Virgin », sur lequel elle danse en ombre chinoise avec cet ami controversé. Sans parler de sa reprise acoustique poignante, mais tout en fausses notes, de « I Will Survive » de Gloria Gaynor.
Minuit passé, la chanteuse se mue en caméléon postmoderniste. Elle enfile une combinaison en mylar réfléchissant pour plonger dans son Métavers. Sous les airs de « Ray of Light », sapée par Versace, elle fait éclater une techno aux rythmes des lasers. En guise de Sanctus, son titre « Celebration » est remixé par Benny Benassi, avec tous ses danseurs grimés de ses looks les plus iconiques. La Madonne de raccrocher, en français approximatif : « Merci Paris ! Et ne mangez pas trop de gâteaux. » Regards hagards dans les gradins, entre de nombreux fans. Jusqu’au bout, ce show aura été sincère. Mais trop désaccordé.
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