Jiri Kylian : « J’aime vraiment les danseurs. Pour moi, ce sont des espèces en danger

, Jiri Kylian : « J’aime vraiment les danseurs. Pour moi, ce sont des espèces en danger

Paris Match. Avec une mère danseuse, vous étiez fait pour ce métier.

Jiri Kylian. En fait, il était assez inhabituel pour un garçon, en Tchécoslovaquie, d’étudier la danse à cette époque. D’ailleurs, je souhaitais être acrobate ! L’école de cirque a fait faillite et ma mère m’a poussé vers le ballet. Et, une fois que j’y avais goûté, je ne pouvais plus m’en passer.

Mais comment devient-on chorégraphe ?

Je voulais, en tant que danseur, être au moins aussi bon que Rudolf Noureev ! Lorsque j’ai compris que ce ne serait jamais le cas, je me suis dit que j’allais utiliser le corps des autres pour mettre en mouvement mes idées.

 La vulnérabilité des danseurs me touche 

Jiri Kylian

Vous dites qu’il n’y a pas un style Kylian…

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C’est vrai ! Si vous travaillez sur une musique de Stravinsky ou une de Webern, votre chorégraphie sera différente. J’essaie d’inventer un nouveau langage à chaque fois, et il serait prétentieux de dire que j’y arrive. Ce qui est important, à mes yeux, c’est de créer pour le public, pas pour les spécialistes. Ma danse est pour tout le monde. Surtout, je crois qu’il n’est pas nécessaire de lire quoi que ce soit sur mes pièces avant de venir. Au contraire, il vaut mieux se laisser surprendre.

Jiri Kylian

Jiri Kylian © Anton Corbijn

Les interprètes, qu’ils soient de l’Opéra de Paris ou d’autres compagnies, sont tous amateurs de votre art. Comment l’expliquez-vous ?

J’aime vraiment les danseurs. Certains chorégraphes choisissent de les punir, de les prendre de haut. J’apprécie avant tout de créer avec les interprètes, c’est un dialogue et ils m’aident à élaborer la gestuelle. Je ne cherche pas seulement l’exécution. La vulnérabilité des danseurs me touche. Ils passent leur temps devant un miroir qui ne cache rien de leurs défauts. Je leur dis, les yeux dans les yeux, de ne pas chercher seulement la perfection. Pour moi, ce sont des espèces en danger.

 C’est merveilleux d’être seul ! 

Jiri Kylian

Pourtant, vous avez décidé de ne pas offrir de création aux solistes…

Ce qui m’apporte le plus désormais, c’est de réaliser des films, de travailler de mes mains sur des installations. Comme pour “Moving Still”, où j’ai fait poser huit danseurs. Nous avons scanné les parties de leur corps pour en faire une sculpture en 3D. Chaque pièce sera scindée en deux et exposée sur une façade vitrée, à l’intérieur et à l’extérieur. Je vois cela comme un prolongement de mon art. Je viens également de finir un autre film avec ma femme, Sabine Kupferberg.

Vous recherchez donc la solitude du créateur !

C’est merveilleux d’être seul ! [Il rit.] Toute ma vie, j’ai été entouré de gens, scruté, et au final critiqué. Un écrivain n’a personne par-dessus son épaule lorsqu’il écrit.

 Le petit garçon que j’ai été n’aurait pas pu imaginer tout ce qui allait se passer dans son existence 

Jiri Kylian

Vous avez été reçu à l’Académie des beaux-arts de Paris en mars 2019. Un moment particulier dans votre vie ?

Je n’ai pas de mots pour dire à quel point j’ai été touché par cet honneur. Tous mes amis, du Japon, ­d’Australie, d’Europe étaient présents. Sabine a même dansé ce jour-là pour moi. Personne n’avait jamais fait cela sous la Coupole auparavant. Le petit garçon que j’ai été n’aurait pas pu imaginer tout ce qui allait se passer dans son existence. Comme ce dernier train quittant Prague pour Stuttgart, où je devais retrouver le chorégraphe John Cranko, en août 1968, alors que mon pays allait se refermer. Puis, plus tard, la direction du Nederlands Dans Theater ou ma venue à l’Opéra de Paris.

Quel conseil donneriez-vous à un jeune danseur ou à un chorégraphe ?

C’est une vie de sacrifices. Ils ou elles doivent se demander s’ils ont quelque chose de spécifique à dire à travers le mouvement qui n’a pas été dit avant. Si vous en doutez, choisissez une autre voie. Mais si vous êtes prêt à tout donner, foncez !

Programme Jiri Kylian (avec «Stepping Stones», «Gods and Dogs», «Petite mort» et «Sechs Tänze»), Palais Garnier, du 8 au 31 décembre.

Programme Jiri Kylian (avec «Stepping Stones», «Gods and Dogs», «Petite mort» et «Sechs Tänze»), Palais Garnier, du 8 au 31 décembre. © DR

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