Danse : la Ménagerie de verre n’a pas changé d’âme

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Il faut avoir « la fesse militante » pour venir dans la « salle-bunker » (rebaptisée depuis « salle off ») de la Ménagerie de verre, avec son plafond bas, son béton, ses gradins… Ce lieu unique du 11e arrondissement est, depuis 1983, un laboratoire en ébullition des formes les plus innovantes, notamment en danse contemporaine.

Cela grâce au flair insensé de Marie-Thérèse Allier, morte l’an passé à 91 ans, qui parvint à transformer cette ancienne imprimerie en lieu de travail et de recherche. Défricheuse hors pair, elle a programmé, parfois avant tout le monde, des chorégraphes comme Alain Buffard, Xavier Le Roy, Régine Chopinot, Christian Rizzo, Rachid Ouramdane, Claudia Triozzi…

Après avoir été à la tête du Théâtre Nanterre-Amandiers de 2014 à 2020, Philippe Quesne vient de prendre la direction artistique de la maison, Christophe Susset étant le directeur exécutif.

Good Boy pour célébrer les quarante ans de la Ménagerie

« Quand j’ai créé la Démangeaison des ailes, il y a vingt ans, Marie-Thérèse a été la première à voir ce spectacle. J’ai moi aussi profité de son flair ! Ce lieu, c’est à la fois sa peau et toute sa pensée », nous confie Philippe Quesne.

« Je ne changerai pas ce qui constituait pour elle le centre affectif de l’endroit » : lieu de répétition en plein Paris, espace de résidence pour chorégraphes et artistes issus du « théâtre expérimental », comme elle disait, sans oublier la poésie sonore.

Les Inaccoutumés, festival bi annuel voulu in situ par Marie-Thérèse Allier en 1995, coïncide cette année avec les 40 ans de la maison. Philippe Quesne en a conçu la programmation en mélangeant créations et pièces du répertoire, avec notamment la reprise de Good Boy (1998), d’Alain Buffard, disparu en 2013 à l’âge 53 ans.

Buffard disait : « Marre de faire le cabri », le danseur n’est pas forcément un sauteur. Inspiré par le corps malade – pourtant outil de travail du chorégraphe, qui découvre sa séropositivité au VIH –, Good Boy, son premier solo, rejetait le regard compassionnel sur le mal dont il souffrait. Buffard se réappropriait par la danse ce « donné pharmaceutique qu’était devenu son corps ».

Christophe Ives, à qui Matthieu Doze a transmis la pièce, est quasi nu, les talons juchés sur des boîtes de Retrovir (antirétroviral utilisé pour le traitement de l’infection par le VIH). Il scotche son sexe (surprotection) et enfile à la suite des dizaines de slips blancs. Il évolue avec parcimonie sur le sol en béton.

L’éclairage au néon rappelle la lumière blafarde de l’hôpital. Buffard a réinventé le corps à partir de zéro. De son propre aveu, il a imaginé « une nouvelle géographie articulaire, une autre grammaire organique », quitte à déplacer « ses fonctions initiales ».

« un lieu de travail et d’exposition des formes »

Autre pièce phare du répertoire : Produit de circonstances (1999), de Xavier Le Roy, qu’il remet sur le métier. Ancien chercheur en biologie moléculaire (ce qui lui a valu d’être nommé « danseur scientifique » !), Xavier Le Roy invente en direct une forme de lecture performante de son sujet d’étude de jadis, non sans humour à blanc, avec deux ou trois parties dansées minimalistes : un effet illusionniste, voulu par l’interprète, donne l’impression que son corps part en morceaux, façon très concrète de déconstruire les hiérarchies en tout genre (sociale, politique) : les avant-bras s’agitent dans un corps amorphe, petits soldats sans tête avançant sur le torse par bonds successifs et saccadés, comme font les araignées. Le corps est au centre de la danse, la théorie végète à la périphérie.

Autre pièce, Ghost Writer and the Broken Hand Break, de la Belge Miet Warlop, pour trois interprètes (elle-même, Wietse Tanghe et Joppe Tanghe). Les trois tournent sur eux-mêmes durant 45 minutes, chacun dans un cercle dessiné au sol à la craie. Ils émettent des sons à l’aide d’instruments ou avec la bouche, petites forces aveugles sans répit, soumis à une idée fixe. L’œil du spectateur, passant d’une mobilité à l’autre, parcourt l’ensemble du dispositif. Le vertige finit par gagner tout le monde. Lorsque tout s’arrête, un silence imperturbable s’installe.

Beaucoup de belles choses sont encore à prévoir, dont, le vendredi 13, une carte blanche à Laura Vazquez, prix Goncourt de la poésie 2023. Avec son équipe réduite, cinq personnes au total, Philippe Quesne souhaite que l’endroit « reste un lieu de travail et d’exposition des formes, qu’on continue d’y défendre cette économie très relative ». Et pourtant essentielle.

À venir en novembre : des spectacles en création comme Louise Siffert, Ola Maciejewska sans oublier Laura Vazquez. La Ménagerie de verre, 12, rue Léchevin, 75011. Renseignements. : 01 43 38 33 44.

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