Paris 2024 : Amélie Oudéa-Castéra et les JO, entre tensions avec Hidalgo et goût du risque

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Il y a des manies plus parlantes que d’autres. Celle d’Amélie Oudéa-Castéra fait sourire bon nombre de ses collègues autour de la table du Conseil des ministres, le mercredi matin à l’Elysée. Lorsqu’elle prend la parole, la ministre des Sports et des Jeux olympiques cite, un à un, le nom et l’intitulé exact du poste de tous ses camarades du gouvernement avec lesquels elle a participé à un événement, monté un projet, visité une installation. « Et parfois… c’est long, se bidonne l’un d’eux. Ça fait bonne élève du premier rang, mais, en vrai, c’est sympa pour nous. »

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« AOC », comme on la surnomme dans les couloirs des ministères, c’est peut-être cela. D’abord, une méticulosité à toute épreuve. Une raideur, voire une psychorigidité, diront certains, qui a eu raison d’une partie de son cabinet dans les premières semaines de son installation. L’ancienne championne junior de tennis, passée par la suite par la case Science Po Paris et ENA – dans la même promotion qu’Emmanuel Macron -, a l’élocution lente et le ton doucereux de ceux qui ne veulent rien laisser au hasard d’une pulsion. Pas même une syllabe. « Avant ses prises de parole, elle est hyperconcentrée, pas un regard, pas un sourire, elle veut que son discours soit millimétré. Mais quand elle parle, c’est agréable, et c’est carré », relate Stéphane Troussel, le président PS de la Seine-Saint-Denis, avec lequel elle est en lien perpétuel en vue des JO. Mais « AOC », à écouter nombre d’acteurs de l’organisation de ces Jeux, c’est aussi, malgré ce que le sport à la balle jaune pourrait laisser penser, un sens aigu du collectif. Capable de mettre en branle d’autres ministres, d’être « en mode projet », glisse son collègue des Transports Clément Beaune : « C’est une grande technicienne doublée d’une sportive qui connaît l’écosystème. Personne d’autre n’a cette double casquette, ce qui en faisait clairement la femme de la situation », poursuit-il.

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Friande de métaphores sportives, celle qui a vu Safet Susic, les brésiliens Raí, Ronaldinho, Neymar et l’octuple Ballon d’or Lionel Messi porter le maillot de la capitale, sa ville de naissance, se considère comme « la n° 10 » de l’équipe dirigeante des Jeux olympiques : meneuse de jeu travailleuse, « capable de gérer à 360 degrés et d’être en première ligne devant les premiers feux ». Un capitaine, en somme. Seulement, une autre joueuse, d’expérience, lorgne le brassard qu’elle pensait avoir depuis longtemps autour du biceps. Le 20 mai 2022, depuis son bureau à la mairie de Paris, Anne Hidalgo doit se rendre à l’évidence – ce qui n’est pas toujours sa tasse de thé : il y a un nouveau shérif en ville. Un nouveau VRP de Paris 2024, et il réside avenue de France, dans l’extrême sud-est de Paris.

Voilà une femme de 45 ans, qui n’a jamais exercé de mandat ni apposé son nom sur un bulletin, venir sur son terrain. De quel droit ? Amélie Oudéa-Castéra n’était pas au Pérou en septembre 2017, lorsque la délégation française, menée fièrement par l’édile, a vu Paris être désignée ville hôte. Amélie Oudéa-Castéra n’a pas, n’est pas, « l’esprit de Lima ». « Quelque part, elle m’en fait le reproche, dit tout bas la ministre des Sports. Elle est crispée, elle pense que j’ai pris un peu trop de place, sans doute… Avec elle, c’est le contraire d’un truc fluide. Elle m’a dit un jour, devant tout le monde : ‘Je vous rappelle que vous êtes nommée, et que moi je suis élue' » conclut-elle en haussant ostensiblement les épaules. Au départ, les échanges étaient frigorifiques ; désormais, ils sont presque inexistants. « Entre Hidalgo et elle, il n’y a pas de bande passante, lâche un proche de la maire. Elle est déjà intégralement saturée par les discussions, les réunions avec Gérald Darmanin. Il n’y a de place pour personne d’autre au gouvernement. Pas pour Oudéa-Castéra. » On a la même passion, mais clairement pas le même maillot.

(g-d) La maire de Paris Anne Hidalgo, la ministre des Sports Amélie Oudéa-Castera, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin et le président du Comité d'organisation des JO-2024, lors de la signature d'un protocole pour la cérémonie d'ouverture, le 23 m

(g-d) La maire de Paris Anne Hidalgo, la ministre des Sports Amélie Oudéa-Castera, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin et le président du Comité d’organisation des JO-2024, lors de la signature d’un protocole pour la cérémonie d’ouverture, le 23 mai 2023 à Paris

© / afp.com/Geoffroy Van der Hasselt

Une ministre « invirable »

Anne Hidalgo regarde Amélie Oudéa-Castéra comme une fonctionnaire qui aurait dû le rester. Les animaux politiques se flairent : elle ne retrouve pas chez elle le palmarès, dirait-on du côté du ministère des Sports, qu’elle respecte. Celui des Pécresse, Darmanin, Troussel, Castex. Bref, celui des élus et, surtout, des réélus. Et puis la machine Paris 2024 tournait avant la réélection d’Emmanuel Macron : que diable avait-on besoin d’ajouter un rouage au beau milieu de cette mécanique ? « Très honnêtement, il n’y avait pas besoin d’une ministre des Jeux olympiques, dit-on dans l’entourage de la maire de Paris. En tout cas, pas à partir de 2022. Ça rime à quoi de nommer un ministre en bout de course, qui vient perturber toute une organisation déjà sur pied ? Elle est regardée par les autres acteurs comme un chien dans un jeu de quilles. Ce n’est pas tellement de sa faute, c’est plutôt une victime du système. » Dans les couloirs de la mairie de Paris, on aime à la considérer comme « la ministre du Budget des Jeux ». Rien de plus. A croire qu’Amélie Oudéa-Castéra ne serait qu’une figure de proue qui, de temps en temps, jette un œil sur des tableaux Excel et rend des comptes au président de la République. « Je ne suis pas d’accord avec cette vision des choses, réagit vivement Stéphane Troussel, lui aussi socialiste, lui aussi maintes fois réélu, mais sans doute un poil plus fair-play. Elle a trouvé sa place, c’est une interlocutrice avec laquelle on travaille très bien et qui est à l’écoute de la Seine-Saint-Denis. Elle a pris goût à la politique, elle prend des risques, elle prend des coups, mais elle a aussi appris à en donner. »

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Il suffit de voir de quelle manière elle a, un mois à peine après sa nomination et lâchée en rase campagne par Gérald Darmanin, géré l’affaire de la finale de la Ligue des champions au Stade de France. Comment, en 2023, elle a accompagné, voire appuyé, la démission de deux monstres du sport français : Bernard Laporte, ex-président de la Fédération française de rugby, condamné pour corruption, et Noël Le Graët, ex-président de la Fédération française de football, visé par une enquête pour « harcèlement moral » et « harcèlement sexuel ». « Pendant l’affaire Le Graët, elle était un peu dans le viseur du président, glisse une ministre. Elle a fait « une Rima » avant Rima (Abdul-Malak) et la légion d’honneur de Depardieu, et le président trouvait déjà qu’il y avait une forme de position moralisatrice qu’il n’aime pas beaucoup… » Ce qui n’a pas empêché le chef de l’Etat de laisser sa ministre des Sports en première ligne, exposée, mais en position de faire grimper sa notoriété et son capital politique. Elle l’assure : « Sur cette affaire, le président m’a fait une confiance absolue. » Plus récemment, son sang n’a fait qu’un tour lorsque Anne Hidalgo, encore elle, s’est épanchée en novembre en lâchant que les transports publics ne seraient « pas prêts » pour les Jeux. A plusieurs reprises, la ministre des JO a démontré qu’elle savait aussi faire du judo pour répondre à la maire de Paris. « Le pis que l’on puisse faire, c’est de la communication Bisounours, dire que tout va bien dans le meilleur des mondes, reconnaît-elle. Non, c’est dur, et ça va être dur. Mais c’est inacceptable de condamner d’ores et déjà les équipes qui bossent en disant qu’on ne sera pas prêts. »

Alors qu’un prochain remaniement d’ampleur paraît de plus en plus plausible, rares sont les ministres qui peuvent dormir sur leurs deux oreilles. Sauf peut-être Amélie Oudéa-Castéra. Par le passé, les ministres des Sports ont pu apparaître comme des appendices interchangeables ; cette fois, c’est différent. A six mois des Jeux olympiques, sans avoir commis de faute majeure, « AOC » est « est parfaitement invirable, il faudrait qu’elle danse sur la table du Conseil des ministres pour qu’elle se fasse sortir », se gaussait l’un de ses collègues il y a trois semaines à peine, au lendemain du vote de la loi immigration. En a-t-elle conscience ? Sans doute. Cela vaut-il tout de même la peine de se battre ? Bien sûr. L’ancienne tenniswoman monte prudemment à la volée : « Oui, bien sûr que je souhaite rester. Sur un sujet comme les JO, le coût d’entrée est tel pour connaître en profondeur les dossiers, pour être au point techniquement qu’il est difficile d’arriver à la toute fin. » A bon entendeur… Au fond, quel compétiteur serait heureux d’aller sur le banc avant la fin du match ?

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