Avec son titre résolument sentimental, le festival Le Temps d’aimer la danse, à l’affiche jusqu’au 16 septembre dans différents lieux de Biarritz (Pyrénées-Atlantiques) et dix-sept villes du Pays basque, attaque la rentrée en douceur et les bras grands ouverts. Trente-quatre ans que la manifestation, pilotée par le chorégraphe Thierry Malandain, directeur du Ballet Biarritz, maintient sa ferveur intacte pour tous les styles et genres. Contemporain, flamenco, hip-hop, danses traditionnelles, le menu joue au yo-yo sans qu’on y laisse son appétit. « Et c’est la bonne recette, ici, pour continuer à susciter la curiosité des gens et à les faire changer d’air quand ils en ont envie », assure Malandain, heureux d’annoncer une billetterie prise d’assaut depuis le mois de juin et des salles pleines.
L’édition 2024, riche de trente-neuf compagnies de tous les gabarits, dont les imposants Ballets de Berne, de Marseille et de Monte-Carlo, s’est ouverte avec une volée de propositions contrastées et électrisantes. Au Théâtre du Colisée, à Biarritz, la jeune artiste coréenne Sun-A Lee déroule les trois volets de Cover Pieces, une quête ritualisée sur le thème annoncé de la guérison. Entre masque de bouc, argile et eau, entourée par trois complices, elle se risque à la lenteur et à l’intériorité.
En mode plus tourmenté, le chorégraphe et breaker espagnol d’origine japonaise Akira Yoshida livre avec Burial of the Bark, une fable existentielle sur la solitude et l’errance. Une valise à roulettes, une chaise d’enfant sont les seuls appuis du personnage masculin qui se débat dans le vide. Régulièrement cerné par l’obscurité, Akira Yoshida donne tout son sens à un hip-hop fluide et nerveux dont les soubresauts et les voltes racontent au plus juste la déroute et la douleur.
L’art d’être en couple
A l’opposé, sous le titre de Fantasie minor, le Portugais Marco da Silva Ferreira enclenche une mécanique ludique et savante pour les danseurs Chloé Robidoux et Anka Postic, véritables ressorts vivants. En plein air, près de la plage, sur un carré de 4 mètres sur 4, cette pièce courte et rapide explose les registres hip-hop, contemporain et classique sur la musique Fantaisie en fa mineur, de Schubert.
Au Théâtre Michel-Portal, à Bayonne, le duo curieusement intitulé Crocodile, de Martin Harriague avec Emilie Leriche, a, en réalité, la peau très douce. Encadrés par deux joueurs de marimba, dont les sons élastiques soulèvent les corps, les danseurs déclinent l’attraction amoureuse dans un nuancier épatant. D’abord éloignés, puis au contact, imbriqués l’un dans l’autre, ils conversent au gré d’une partition de mouvements aussi inventive que volubile. La jambe de l’un dialogue avec le bras de l’autre, une nuque se secoue qui fait trembler à distance un genou, un visage s’incruste entre les mains de son partenaire… Echos et variations, ce ping-pong léger et magique engendre un merveilleux mikado, dont l’abstraction s’auréole de tendresse. La géométrie se met au service de l’art d’être en couple et c’est un régal. Avec cette pièce, qui a fait se lever les spectateurs, Martin Harriague, repéré depuis cinq ans et nouvellement nommé directeur du Ballet de l’Opéra Grand Avignon, impose son écriture.
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