Jacques Audiard : « Selena Gomez a été le moteur danse et chant du film

, Jacques Audiard : « Selena Gomez a été le moteur danse et chant du film

À Cannes, la presse française en avait fait sa Palme d’or. Évidente. Importante. Nécessaire. Mais le jury présidé par Greta Gerwig a choisi de couronner une autre forme de cinéma en palmant « Anora », de Sean Baker. Jacques Audiard avait de toute façon déjà eu les honneurs de la ­récompense suprême pour « ­Dheepan » en 2015. Mais quand son « Emilia Perez » a reçu le prix d’interprétation pour ses quatre actrices, Selena Gomez, Zoe Saldana, Karla Sofia Gascon et Adriana Paz, le cinéaste de 72 ans était « heureux. C’est ce que j’avais espéré, pour elles, pour le film ».

Las, quelques minutes plus tard, Audiard est appelé sur scène pour recevoir le prix du jury. ­Quasiment anecdotique pour lui ? « Oh, j’ai vécu Cannes comme quelque chose de très dur, décrypte-t-il quelques semaines plus tard, dans son antre parisien. J’ai porté ce ­projet pendant quatre ans. Tout n’a pas été simple… »

 Le scénario d’“Emilia Perez” m’est venu sous forme de livret d’opéra 

Jacques Audiard

À l’origine d’« Emilia Perez », il y a « Écoute », un livre de Boris Razon, qui évoque au détour d’un chapitre la transition d’un narcotrafiquant. « Comme, dans son roman, Razon ne donnait pas suite à cette proposition, je m’en suis emparé », poursuit Audiard. J’avais une envie de ­comédie musicale depuis longtemps. En écrire une, c’est autre chose. Dès “Un héros très discret” avec Alexandre Desplat, on avait caressé l’idée d’en faire un petit opéra. Après “Un prophète”, l’envie était toujours là. Mais c’était resté en l’air. Là, le scénario d’“Emilia Perez” m’est venu sous forme de livret d’opéra, les ­personnages sont très archétypaux, le récit est divisé en tableaux… Et en cours de route, en faisant appel pour la musique à Camille et à ­Clément Ducol, c’est devenu une comédie musicale. »

Selena Gomez, Zoe Saldana et Karla Sofia Gascon, actrice transgenre qui interprète les personnages de Manitas et d’Emilia Perez, lors du dernier Festival de Cannes.

Selena Gomez, Zoe Saldana et Karla Sofia Gascon, actrice transgenre qui interprète les personnages de Manitas et d’Emilia Perez, lors du dernier Festival de Cannes. Paris Match / © Vincent Capman

« Emilia Perez » raconte donc la transition de Manitas, patron d’un ­cartel mexicain. À l’origine de sa décision, l’envie d’en finir avec la ­violence du narcotrafic, qui lui permet certes d’accumuler les millions, mais lui impose de vivre sur les routes, de planque en planque, ne ­mettant jamais sa famille à l’abri. Alors ­Manitas maquille sa propre mort et se réinvente à l’autre bout du monde en Emilia Perez grâce à la complicité de Jessi Del Monte, son avocate. Jusqu’au jour où Emilia décide de rentrer au Mexique, pour retrouver ses enfants…

« Ce tournage a été beaucoup plus lourd que tous mes autres films, révèle Audiard. Mais j’ai la faiblesse d’être sensible au fait que ce soit différent. Franchement, voir les comédiennes chanter et danser, c’était exaltant, on s’arrêtait tous de travailler pour les regarder… » D’autant que ni Zoe ­Saldana ni Selena Gomez ne sont des habituées du cinéma européen, encore moins français. Audiard s’en étonne. « Qu’est-ce qui vous surprend dans la présence de Selena à mon ­casting ? »

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 Mes films racontent, il me semble, ce que je pense du monde, ce qu’il m’inspire. Je ne pense pas avoir besoin d’en dire plus 

Jacques Audiard

Le réalisateur, qui n’a jamais caché son dégoût des réseaux sociaux, se fiche de savoir qu’elle est l’une des actrices les plus suivies sur Instagram au monde. « Selena a vraiment été le moteur danse et chant du film. » Mais la vraie découverte du dixième long-­métrage du cinéaste est Karla Sofia Gascon, qui joue à la fois Manitas et Emilia Perez. « Ce n’était pas une évidence pour moi, concède Audiard. Mais elle a tellement insisté, elle a tellement souhaité jouer les deux personnages que je me suis dit qu’il fallait lui ­donner sa chance. D’autant que Karla Sofia a été difficile à trouver. Mais elle a été acteur avant de devenir actrice, et elle a su à merveille s’immiscer dans les deux personnages. Elle m’a beaucoup aidé à ­comprendre la transidentité, je lui ai posé mille questions, elle m’a toujours répondu avec finesse. »

Certains verront dans « Emilia Perez » la vision romantique d’un ­septuagénaire blanc sur la transition. Dans toute la seconde ­partie du film, Emilia n’est qu’amour, se réincarne en déesse des âmes brisées un peu trop facilement. Audiard sourit. « C’est la comédie musicale qui ­permet cela. N’oubliez pas que les personnages se mettent subitement à chanter. Personne ne fait ça dans la vie. Il faut quand même à l’écran que ce soit crédible. Et seul le cinéma permet d’y croire. » Audiard fait aussi un film hautement politique. Lui qui ne signe ni ­tribune ni pétition se méfie des foules, qui peuvent assassiner ceux qu’elles ont ­portés aux nues. « Je ne crois pas à l’utilité de ces choses-là. En revanche, mes films racontent, il me semble, ce que je pense du monde, ce qu’il m’inspire. Je ne pense pas avoir besoin d’en dire plus. »

 Une comédie musicale racontant une transition, interprétée en espagnol, tournée en studio en France, ce n’était pas une évidence…  

Jacques Audiard

Contrairement à son père qui se délectait des mots, Audiard est un homme de peu. Ne cherchant pas à allonger ses réponses pour amuser la galerie. Non, le cinéaste va à l’essentiel, se permettant de beaux moments de cinéma quand il filme ses héroïnes en pleine détresse. Empruntant les codes du thriller quand il s’agit de montrer la ­violence des cartels de la drogue. « Encore une fois, je veux être dans la différence, c’est ce qui m’anime le plus. Parce que franchement, sur le papier, une comédie musicale racontant une transition, interprétée en espagnol, tournée en studio en France, ce n’était pas une évidence… ».

Cinéaste caméléon, Audiard sait combien inventer des histoires permet de mieux décrire le monde dans lequel on vit. De mieux le comprendre. Et de mieux ­l’accepter aussi ?

«Emilia Perez», en salle actuellement.

«Emilia Perez», en salle actuellement. © DR ​

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