Après avoir mis en ligne son nouvel album « Vulture 1 » le 9 février, le rappeur sulfureux Kanye West a annoncé la tenue d’une petite tournée d’écoute en Europe. Habitué à bousculer les codes de l’industrie, il propose cette fois-ci non pas des concerts mais des « expériences musicales immersives ».
Autrement dit, des représentations simplistes dans des salles démentielles où le nouveau sésame tournera sur enceinte, sans micro ni scénographie particulière. Après Bologne et Milan, le rappeur arrivait à Paris le 25 février dernier dans la mythique salle de Bercy.
En attente d’un phénomène rare
Dimanche sous la pluie, une ambiance pesante se fait sentir aux alentours de l’enceinte de l’Accor Arena. L’impression qu’un phénomène rare va se produire. Dans la queue, devant l’entrée des loges, les proches et invités de Kanye s’émoustillent. Habitués des Fashion Week en tous genres, ils arborent des tenues osées, certains n’ayant même pas pris la peine de mettre des vêtements sous leur grande cape noire.
Le concert n’a encore pas commencé que les problèmes d’organisation se manifestent. Les invités de Kanye n’ont pas accès à leur place, se bousculent, s’offusquent devant les « physios », et pour cause, le rappeur n’a validé les listes qu’au dernier moment.
Une des responsables de production explique que « l’organisation a été chaotique ». Le rappeur n’a réservé la salle que quelques jours avant la date et il communique peu, et toujours froidement. Si l’annonce de l’évènement avait un goût de surprise pour les aficionados, on comprend que les dernières nuits ont été courtes pour les organisateurs. « C’est du Kanye quoi ! », se résigne l’un d’entre eux.
Des fans toujours là, malgré les polémiques
Une fois dans la salle, l’ambiance est électrique, portée par des zélateurs infatigables qui ont payé une certaine somme pour voir un bout du phénomène. Il faut dire que le génie qu’était Kanye à l’époque de son premier album, « The College Dropout » en 2004, a fédéré de nombreux fans. Mais l’artiste novateur, hyperactif et bourré de talent a perdu de sa superbe, désormais indissociable des nombreuses polémiques qui l’entourent.
Pendant les 45 minutes de retard qui ont précédé l’arrivée de Kanye sur scène, les slogans fusaient. Du classique « Allez Paris ! » au plus engagé « Macron démission » … Dans les gradins, on entend des bribes de discussion, « évidemment qu’il va chanter », « à ce prix-là, il a intérêt à ramener toute sa clique ! »
Las, il ne fallait pas en attendre plus que ce qui était annoncé. À savoir, une « écoute », censée être une belle expérience immersive.
Pas de micro, une projection de lumière et des fumigènes
21h45. Un nuage de fumée colle sur le sol de la scène vide. Kanye West arrive accompagné de Ty Dolla Sign, l’acolyte avec qui il a réalisé l’album. Cagoulé et masqué comme à son habitude, l’interprète de « Good Morning » porte une grosse veste qu’il enlève une fois en pleine lumière. Les deux artistes sont éclairés par un simple faisceau lumineux qui contraste avec leur style charbon. Scénographie simpliste, à l’instar de leur prestation. Simple. Basique.
Pour juger la performance, encore faudrait-il qu’il y en ait eu une. Car « Ye » et son binôme ont proposé plus d’une heure de playback et de danse aléatoire sur fond de leur album commun. Les quelques apparitions, notamment de sa fille North West, des featurings de l’album et de danseuses mal briefées, ont permis de contrecarrer le vide astral du concert. Pas un mot, pas un visage, mais assez pour entraîner les foules.
Pendant une heure et demie, les morceaux se sont enchaînés sans transition et les rappeurs gesticulaient entre ombre et lumière sous les acclamations du public. Contrairement à l’écoute qu’il a organisée à Milan dernièrement, l’artiste a ajouté à la liste quelques-uns de ses anciens tubes pour prolonger les festivités. Une fois le récital achevé, Kanye daigne enlever son masque, lève les mains au ciel pour remercier la foule ébahie et met fin à la mascarade.
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